1 October 2011
Goodison Park,
Liverpool
Referee: M. Atkinson
Attendance: 39510
Passer d'Everton à Liverpool, c'est changer de planete en matiere de santé financiere. Pourtant, il faut à peine vingt minutes pour traverser Stanley Park du nord au sud et se rendre de Goodison Park à Anfield. L'extraordinaire réussite des Reds en Angleterre et en Europe dans les années 70 et 80 ouvrit un fossé économique qui, aujourd'hui, est devenu un gouffre. Le chiffre d'affaires de Liverpool (210 M€) en fait le quatrième club le plus riche de la Premier League et le huitième dans le monde, tandis que les Toffees passent tout juste la barre des 90 M€, soit 30 M€ de moins que la masse salariale de Liverpool en 2009-10. Les joueurs les mieux payés des Reds, Glen Johnson et Steven Gerrard (enfin de retour comme titulaire ce week-end après plus de six mois d'absence), gagnent 8 M€ par an, quatre fois plus qu'un Tim Cahill.
Goodison Park,
Liverpool
Referee: M. Atkinson
Attendance: 39510
Passer d'Everton à Liverpool, c'est changer de planete en matiere de santé financiere. Pourtant, il faut à peine vingt minutes pour traverser Stanley Park du nord au sud et se rendre de Goodison Park à Anfield. L'extraordinaire réussite des Reds en Angleterre et en Europe dans les années 70 et 80 ouvrit un fossé économique qui, aujourd'hui, est devenu un gouffre. Le chiffre d'affaires de Liverpool (210 M€) en fait le quatrième club le plus riche de la Premier League et le huitième dans le monde, tandis que les Toffees passent tout juste la barre des 90 M€, soit 30 M€ de moins que la masse salariale de Liverpool en 2009-10. Les joueurs les mieux payés des Reds, Glen Johnson et Steven Gerrard (enfin de retour comme titulaire ce week-end après plus de six mois d'absence), gagnent 8 M€ par an, quatre fois plus qu'un Tim Cahill.
Everton est endetté à hauteur de 54,7 M€ et grevé par des paiements d'intérêts tels que le club a été incapable de procéder à un quelconque recrutement depuis deux saisons, les rares arrivées (Drenthe et Stracquilarsi en 2011-12) étant des prêts. Pis, il est devenu indispensable de vendre pour honorer les factures à payer : hier Rooney et Lescott, cet été Mikel Arteta, en attendant Rodwell, Jagielka et Saines. De son côté, Liverpool, qui avait frisé la faillite il y a un an avant que son créancier numéro un, la Royal Bank of Scotland, ne contraigne les Américains Hicks et Gillett à vendre leur club au Fenway Sports Group de J.W. Henry,a opéré un redressement spectaculaire. La dette a été réduite à zéro, et l'on s'attend à ce que les comptables annoncent un bénéfice pour l'exercice 2010-11. Un nouveau contrat de sponsoring maillot passé avec la banque Standard Chartered lui rapporte 22,8 M€ par an ; à titre de comparaison, l'accord signé entre Everton et le brasseur thaïlandais Chang en novembre 2010 ne pèse que 4,6 M€ par saison. Quel que soit le point de comparaison (revenus aux guichets les jours de match : 49 M€ pour Liverpool, 26 M€ pour Everton), il n'y a et ne peut y avoir qu'un seul vainqueur, tant que le président des Toffees, Bill Kenwright, n'aura pas trouvé un repreneur prêt à investir autant que J.W. Henry le fit chez le voisin en octobre 2010.
Pour Everton, l'objectif est clair: survivre. Survivre en Premier League avec un effectif saigné chaque été ; survivre face aux exigences de créanciers de plus en plus impatients. L'imprésario théâtral Bill Kenwright, habitué de Goodison depuis plus d'un demi-siècle, est incapable de faire face aux obligations de son club et cherche donc un sauveur depuis près de dix ans, maintenant qu'il semble impossible que son rêve d'un nouveau stade Ces projets de Kings Dock en 2003 et de Kirkby en 2008) devienne jamais réalité. L'idée d'une nouvelle arène commune que partageraient Reds et Toffees, pour beaucoup le choix du bon sens, n'est plus d'actualité. Liverpool, à qui la municipalité vient d'accorder un délai de réflexion supplémentaire, a obtenu un permis de construire pour son nouvel Anfield, qui serait bâti à Stanley Park, mais continue d'étudier un agrandissement de son stade actuel. Ce qui est acquis, c'est que les destins des deux clubs suivront des chemins différents en la matière. Kenwright, de plus en plus contesté par certains supporters (regroupés au sein de la Elue Union), n'entend pas se débarrasser du club qu'il aime tant en le vendant à un aventurier ou à un spéculateur. Il refusa ainsi une offre d'Alexandre Gaydamak avant que celui-ci ne reprenne Portsmouth, avec les conséquences que l'on sait.
Il est difficile de parler de projet dans ces conditions, malgré le travail admirable de David Moyes sur le banc. Liverpool, en revanche, entend retrouver le top 4 dès cette saison et s'en est donné les moyens en dépensant intégralement les millions recueillis par la vente de Javier Mascherano et Fernando Torres, et même plus (156 M€ en deux ans). Le plan de JW. Henry (assisté de Damien Comolli comme directeur sportif) est ambitieux, mais raisonnable. Le potentiel d'expansion du club est en effet gigantesque. Liverpool demeure une tête d'affiche, tandis qu'Everton, premier rôle dans les années 80, n'est plus qu'un figurant. Manchester United a peut-être gagné la première Coupe d'Europe de l'Angleterre, en 1968, mais le nom des Reds, vainqueurs de cette compétition à cinq reprises, résonne presque aussi fort en Europe et, crucialement, sur les marchés émergents d'Asie et du Moyen-Orient.
Les deux entraineurs sont deux Ecossais de Glasgow qui ont joué au Celtic. Issus de milieux modestes, ils sont des dieux vivants pour les supporters des clubs qu'ils entraînent et qu'ils ont servis avec une loyauté sans faille. Deux vies en parallèle pour ces deux hommes qui n'ont presque rien en commun. Moyes est un passionné introverti, profondément croyant, d'une courtoisie sans faille, mais capable de trancher dans le vif sans faire de sentiment Dalglish, plus calculateur, manœuvrier, spécialiste de l'humour à froid, a aussi un cœur énorme, surtout quand il s'agit de Liverpool. Personne ne fit autant que lui pour panser les plaies de Hillsborough. Et si Dalglish fut un authentique grand, peut-être le plus grand joueur de l'histoire du football écossais, avec le génial Jim Baxter, Moyes, lui, n'a qu'un seul titre à faire valoir pour dix-neuf années de professionnalisme (champion d'Ecosse avec le Celtic en 1981-82, quand il avait dix-neuf ans), contre les vingt-quatre du sexagénaire King Kenny. Le palmarès de manager de Dalglish (sept titres), dernier technicien à avoir mené les Reds au titre (en 1990), est aussi sans comparaison avec celui de Moyes, champion de D3 avec Preston, et c'est tout.
Mais demandez aux initiés qui est le meilleur entraîneur des deux, et beaucoup choisiront le second, qui a accompli des miracles (Everton, quatrième du Championnat en 2004-05, devant... Liverpool, sacré champion d'Europe) avec des moyens presque inexistants depuis son arrivée à Goodison, en mars 2002. Mais combien de temps ces miracles dureront-ils ? Le sens de la fidélité et l'amitié réelle qui le lie à Kenwright ont retenu le triple manager de l'année en Angleterre (2003,2005 et 2009) à Everton. Mais le club est engagé dans un déclin que ce gagneur né ne peut que repousser de saison en saison. Dalglish, lui, dirige un club qu'il a pris en main quand il était au pinacle, et qui espère y remonter très vite. L'un regarde vers le haut, l'autre vers le bas.
Liverpool n'est pas une ville que le football separe par la haine ou le sectarisme, comme Glasgow ou Edimbourg. Il est fréquent que la même famille rassemble des supporters des deux clubs, et le derby de la Mersey est d'ailleurs le seul match du Championnat d'Angleterre dans lequel aucune ségrégation n'est imposée aux fans. Blues et Reds se retrouvent fréquemment assis les uns à côté des autres dans les tribunes. Les incidents sont rarissimes, ce qui est d'autant plus surprenant que les fidèles de Goodison ont de bonnes raisons d'en vouloir à ceux dAnfield... qui avait été le stade d'Everton jusqu'en 1892, lorsque son président, John Houlding, décida de créer un club concurrent - Liverpool FC, bien sûr -, contraignant les Toffees à bâtir leur propre arène de l'autre côté de Stanley Park. Les profils des supporters sont cependant distincts. Ce n'est pas pour rien que Wayne Rooney et Joey Barton ont le sang bleu : Everton est un club prolétaire et fier de l'être (« le club du peuple », comme le dit Moyes dans sa première conférence de presse à Goodison), fier également de ses liens avec l'Irlande catholique, tandis que Liverpool, où tant d'Écossais ont imprimé leur marque (neuf des treize premiers joueurs à passer la barre des cent matches pour les Reds venaient d'au-delà le mur d'Hadrien), pencherait plutôt vers le protestantisme. Cela dit, la tolérance prévaut. Liverpool, avec plus de 200 fan-clubs officiels dans 30 pays, a une dimension globale qui échappe à Everton, malgré ses efforts d'implantation en Asie du Sud-Est et son statut « culte » au pays de Galles. C'est que trois Gallois, Southall, Ratcliffe et Van den Hauwe, figuraient dans l'équipe d'Everton qui battit le Rapid Vienne en finale de la Coupe des Coupes en 1985, après avoir sorti le Bayern en demies. On a la mémoire longue en Angleterre. À Liverpool, plus encore.
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